9.11.06

Elections - Nicaragua


Reconnaissant sa défaite, le candidat conservateur Eduardo Montealegre (g.) serre la main de Daniel Ortega (d.),
candidat du Front Sandiniste de libération nationale (FSLN), élu président du Nicaragua.


Daniel Ortega revient au pouvoir

Daniel Ortega est élu triomphalement, au premier tour de l'élection présidentielle du 5 novembre. Après dépouillement de 92% des suffrages, l'ex-guérillero, candidat du Front sandiniste de libération nationale (FSLN), obtient 38,08%, selon les derniers résultats annoncés par le Conseil suprême électoral (CSE). Ses adversaires de droite arrivent largement derrière avec 29% pour Eduardo Montealegre, candidat de l'Alliance libérale nicaraguayenne (ALN) et 26,21% pour José Rizo du Parti libéral constitutionnaliste (PLC).

Daniel Ortega a triomphé au premier tour de l'élection présidentielle. Les derniers résultats publiés par le Conseil suprême électoral portant sur le dépouillement de 92% des suffrages lui accordent 38,08%, soit une avance de huit points par rapport à son principal adversaire, le candidat de droite soutenu par les Etats-Unis, Eduardo Montealere qui se situe à 29%. En troisième position, José Rizo, du PLC, le Parti libéral constitutionnaliste, obtient 26,21% des voix, suivi du dissident sandiniste Edmundo Jarquin, du Mouvement de rénovation sandiniste (MRS) avec 6,44%.

La poignée de mains entre Ortega et Montealegre est hautement symbolique. Le millionnaire Eduardo Montealegre, le candidat de Washington, a très vite reconnu la victoire du candidat sandiniste, Daniel Ortega. L'ex-guérillero, l'ami de Hugo Chavez et la bête noire des Américains revient au pouvoir seize ans après l'avoir abandonné sous la pression des Etats-Unis qui ont financé les Contras (les Contre-révolutionnaires), plongeant le pays dans une guerre civile qui a fait plusieurs dizaines de milliers de morts.

Cette fois-ci, la Maison Blanche se déclare prête à travailler avec le futur président, Daniel Ortega, indiquant prudemment qu'elle collaborerait avec lui sur la base de son engagement en faveur d' un «avenir démocratique» pour son pays. Le porte-parole du Conseil de sécurité nationale, Gordon Johndroe a souligné que «les bases» existaient pour accroître «la prospérité et les chances du peuple nicaraguyaen». Un Accord de libre-échange entre les Etats-Unis et différents pays d'Amérique centrale, parmi lesquels le Nicaragua, rappelle-t-il, ainsi que des programmes incitant à des réformes démocratiques et économiques et à la réduction de la dette nicaraguyaenne.

Après avoir échoué à réunir une droite divisée qui s'est présentée en ordre dispersée à ce premier tour, les Etats-Unis sont forcés de s'accommoder d'un Ortega nouveau, qui a abandonné son discours d'ancien guérillero pour prôner «amour, paix et réconcliation» pendant la campagne électorale.

En 1990, lorsque les larmes aux yeux, il avait reconnu sa défaite face à la libérale Violette Chamorro, Daniel Ortega était devenu le premier dirigeant révolutionnaire d'Amérique latine arrivé au pouvoir par les armes à le quitter battu dans les urnes. Il avait juré d'y revenir un jour. Pour cela, et après trois tentatives sans succès, il a décidé de présenter une autre image de lui et n'a pas hésité à faire des concessions. Ses détracteurs l'accusent d'avoir passé un pacte avec le diable, avec notamment une alliance conclue au Parlement avec l'ancien président de droite Arnoldo Aleman, aujourd'hui en résidence surveillée pour corruption.

Autre temps, autres moeurs

Autre fait marquant, cette année, Daniel Ortega s'est marié à l'Eglise avec Rosario Murillo dont il a six enfants. La cérémonie a été bénie par le cardinal Obango y Bravo, avec lequel les relations étaient extrêmement tendues dans les années 80. Mgr Obando y Bravo, archevêque de Managua, avait alors mené un combat antisandiniste avec l’approbation de Jean-Paul II qui ne supportait pas la présence de trois prêtres dans ce gouvernement. Pendant son voyage au Nicaragua, Jean-Paul II avait clairement déclaré son hostilité à une Eglise Populaire lors d'une messe chahutée, le 4 mars 1983.

Ce temps-là est bien révolu. Le nouveau Daniel Ortega n'a pas arrêté de marteler, pendant la campagne électorale, le nom de Dieu, Jésus et du défunt Pape. Preuve, si besoin est, que les temps ont changé. Une stratégie bien étudiée qui lui a permis de gagner son pari. Ses premières déclarations, dès l'annonce des résultats partiels, se sont voulues rassurantes pour Washington.

En effet, dans la nuit de lundi à mardi, Daniel Ortega a rencontré l'ancien président des Etats-Unis, Jimmy Carter dans un hôtel de Managua. Pour la première fois, le candidat donné vainqueur s'est exprimé devant la presse pour rassurer Washington ainsi que les investisseurs étrangers. Il a réaffirmé sa volonté d'«éradiquer la pauvreté, de garantir la sécurité des intervenants nationaux et étrangers et de développer des relations avec l'ensemble de la communauté internationale», soulignant l'importance qu'il accorde à la «réconcliation de la famille nicaraguayenne».

Reste que, aux yeux de Washington, Ortega est l'ami du président cubain Fidel Castro et du Vénézuélien Hugo Chavez. Son élection ne manquera sans doute pas de renforcer le camp des plus fervents opposants à la politique du président George Bush en Amérique latine. Fidel Castro a salué la «victoire grandiose» d'Ortega. Hugo Chavez, a été le premier a adresser ses félicitations à son ami Ortega, qui de son côté, lui a chaleureusement souhaité sa propre victoire lors de l'élection du 3 décembre prochain au Venezuela.

par Elisa Drago

Article publié sur RFI.fr le 06/11/2006 Dernière mise à jour le 06/11/2006 à 14:43 TU

0 Commentaires:

Post a Comment

<< Home